La creation artistique ?

La création artistique ?

« Il n'est en art qu'une chose valable, celle qu'on ne peut expliquer », Georges Braque.
Nous nous interrogerons au fil de la soirée sur ce qu’est la création et en particulier la création artistique. En quoi l’artiste est il créateur ?  Quand peut-on parler de création artistique ? La créativité est généralement définie comme un processus par lequel un individu témoigne d’originalité dans la manière d’associer des choses, ce qui modifie la perception  d’un public. Mais si la créativité se définit principalement par l’originalité, à l’heure où l’art doit constamment se renouveler et surprendre, comment peut-on distinguer ce qui relève de la création, de l’original, de ce qui relève du simplement nouveau et de l’innovation ?  L’original est il nouveau et le nouveau est il nécessairement original ?
I/ En quoi l’artiste est il créateur ?  
Qu’est ce qui distingue la création de la créativité ?
·         La création se définit comme une forme spécifique de production. Cette forme de production, qui refait surface depuis les années 70, se défini primitivement comme une conduite instauratrice observable et génératrice d’œuvres.
Elle nécessite (pour être création) trois conditions : a/ l’unicité de l’objet produit (un prototype est une création) ; b/ le statut de «pseudo-objet » (c'est-à-dire qu’il possède une « aura » singulière, une « personnalité » ; c/ qu’elle ce pose en rupture avec les routines « archéologiques », qu’il impose à l’artiste une « responsabilité compromettant ».

·         La créativité décrit — de façon générale — la capacité d'un individu à imaginer ou construire et mettre en œuvre un concept neuf, un objet nouveau ou à découvrir une solution originale à un problème. Elle peut être plus précisément définie comme « un processus psychologique ou psycho-sociologique par lequel un individu témoigne d'originalité dans la manière d'associer des choses, des idées, des situations et, par la publication du résultat concret de ce processus, change, modifie ou transforme la perception, l'usage ou la matérialité auprès d'un public donné. ».

Qu’est ce l’agir créateur ?

L’œuvre créée par l’artiste se présente souvent comme un « monde » ayant son autonomie et son ordre interne. La conduite instauratrice de l’artiste a pour fin l’existence de l’œuvre et non par forcément le beau.
Il reste que la création est essentiellement une dimension de l’agir, de la pratique (poesis).
L’homme vit parfois son agir comme un agir créateur. L'analyse de ce fait vécu de la création permet de la distinguer de toute autre forme de production, naturelle ou humaine. Le mécanisme de la fabrication s'oppose à la spontanéité de la création. Cette spontanéité diffère aussi de la spontanéité simplement naturelle qui, en ses cycles monotones, ne fait que répéter ses produits.
La création est elle toujours activité ?
                Tout en relevant essentiellement de l’agir, elle n’est pas qu’activité. Elle est joie et souffrance, activité et passivité, liberté et déterminisme. Elle est la manifestation de la possession de l'homme par une force qui agit en lui et par lui. En effet, le créateur ne sait ce qu'il va faire, ce qu'il veut faire, qu'une fois qu'il l'a fait ; nous devrions même dire : qu'une fois que cela s'est fait en lui. La création est une activité empêtrée dans une passivité et une passivité stimulée par une activité, elle est puissance et impuissance. Mais le créateur est celui qui sait précisément accepter cette passivité, se faire tel que l'œuvre puisse se faire en lui, employer en quelque sorte son activité à se rendre passif.
La création est elle spontanéité ?  
                Comme tout phénomène humain, la création a des conditions sociales déterminées, qui consistent dans l'existence, d'une part, de certains moyens techniques qui sont mis à la disposition du créateur, d'autre part, de certaines exigences qui sont celles de la société de l'époque.
                Lévi-Strauss précise dans La voie des masques, à propos de la spontanéité en art, que « en se voulant solitaire, l’artiste se berce d’une illusion peut être féconde, mais le privilège qu’il s’accorde n’a rien de réel. Quand il croit s’exprimer de façon spontanée, faire œuvre originale, il réplique à d’autres créateurs passés ou présents, actuels ou virtuels. Qu’on le sache ou qu’on l’ignore, on ne chemine jamais seul sur le chantier de la création. ».
La création est rupture :
Mais l'histoire étant la différence au sein de l'identité, cette relation de toute création aux créations antérieures implique que l'assimilation de celles-ci par l'imitation soit un simple moment par lequel le futur créateur se fortifie avant de rivaliser avec ses maîtres. Le moment de la rupture est essentiel à la création ; le créateur est d'abord celui qui saisit comme négatif cet acquis culturel dont il s'est imprégné. Le sociologisme de Durkheim a tenté de montrer, dans cette négation de la culture d'une société, l'œuvre de cette société elle-même, en tant qu'elle s'opposerait à elle-même et commencerait de vaincre son présent par son avenir.
II/ Comment peut-on distinguer ce qui relève de la création, de l’original, de ce qui relève du simplement nouveau et de l’innovation ? 
                La création semble donc relever principalement de l’agir pour autant que créer consiste à produire une œuvre, un objet unique ayant une « aura » et en rupture avec ce qui précède. Tandis que la créativité est la capacité d’engendrer du nouveau et l’innovation celle de pérenniser ce nouveau.
Pour mieux illustrer ces distinctions nous allons réfléchir sur trois exemples :
·         1/ Les « ready-made » de Duchamp ? Création ou innovation ? Par définition le « ready-made » (déjà fait) n’est pas une création de l’artiste, toutefois on lui accorde le titre d’artiste. En quoi y aurait-il création et pas simplement innovation?

·         2/ Le portrait photographique ? Ce dernier semble n’être qu’une fidèle copie du réel permis par une innovation pourtant il peut être considéré comme une création, comment comprendre cela ? En quoi est-il création ?

·         3/ Le monochrome ? Il semble avoir été considéré comme création puis innovation, pourquoi ? peut-on créer une couleur ? En quoi est ce créatif et innovant ?
La création est tributaire de l’innovation mais elle semble ne pas s’y réduit pas.
L’original est il nouveau et le nouveau est il nécessairement original et créatif ?

« Affolés par les deux innovations majeures que constituèrent, en peinture, l’impressionnisme et le cubisme se succédant coup sur coup dans le laps de quelques années, hantés surtout par le remords de les avoir d’abord  méconnues, nous nous sommes donné pour idéal, non ce que des innovations fécondes pourraient encore produire, mais l’innovation elle-même. », « non contents de l’avoir en quelque sorte divinisée, nous l’implorons chaque jour qu’elle nous octroie de nouveaux témoignages de sa toute puissance. On connait le résultat : une cavalcade effrénée de styles et de manières, jusque dans l’œuvre de chaque artiste. En fin de compte, c’est la peinture comme genre qui n’a pas survécu aux pressions incohérentes exercées sur elle pour qu’elle ne cesse pas de se renouveler » ; Le regard Eloigné, Lévi-Strauss.

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